14/09/2010

15. Méfiez-vous des enfants sages - Cécile Coulon


"Il n'y avait aucune raison de se faire du souci, Dieu était là, il veillait au grain, perché sur son cumulus, la bière en équilibre, avec une paire de jumelles cerclées d'or pour me surveiller. C'était cool. Mais c'était fini. Tout est fini. Si Eddy était encore là, je suis sûre qu'il comprendrait. Nous étions deux dans cette foutue rue à croire réellement en Dieu, et nous nous arrangions avec lui quand nous en avions besoin. Maintenant, je suis toute seule, et je n'ai pas envie d'arranger quoi que ce soit, je n'ai pas envie de rafistoler les morceaux de foi avec du vieux Scotch, histoire de montrer que jai essayé d'oublier, ou de vivre avec. Je ne veux pas croire que tout est bien qui finit bien. Eddy n'était pas un mec bien. Alors Dieu, ou Jésus, je vous ai toujours confondues de toute façon, prends tes cliques et tes claques, retourne là d'où tu viens, enlève moi cette couronne à la con et trouve-toi des fringues propres. Cherche un taf, un vrai, fais-toi des mots croisés, appelle tes potes de la Cène et organise un barbecue avec merguez et sauce piquante, et surtout ne me dis plus ce qui est bien ou mal, n'essaie pas de me montrer le chemin, parce que tu tout ce que tu as fait dans ta longue vie d'Éternel, il n'y a pas de quoi être fier. Vraiment pas."

Tout le ton du livre est comme ça. Grinçant, cru, dérangeant. Et puis en même temps, c'est une jolie histoire.
Quoique non, l'histoire elle est dégueulasse. Cette jeune fille, Kerrie, qui s'en va loin, loin et qui revient. Obligée. Cet homme qui n'a rien fait de sa vie, Markku. Qui ont eu une petite fille, Lua.
"Je m'appelle Lua, et je déteste le chocolat noir".
Sa maman relit sans cesse Le Royaume des Mouches, et elle est triste. Son père lui, il a ramené la Grande Araignée, celle qui bouffe le cerveau de sa fille. Et sa fille qui est amie avec son voisin fou, bizarre, mais qui croit, qui croyait en Dieu. Et puis, aussi elle était amie avec cette fille borgne, Kristina, qui est partie, loin, sur une île. Et aussi ce prof, un peu fou avec ses cheveux blancs, Freak, son confident.
Cette petite Lua, ses grandes peurs, ses souhaits, ses désirs. Son trafic de réglisse, ses longs cheveux, et Dieu aussi.
Et puis Eddy, le voisin, il est mort. Et son papa, il est parti, loin, en Australie, et sa mère, elle s'en fout, elle couche avec d'autres hommes. Et Lua.
"J'ai arrêté de croire en Dieu, j'ai arrêté de croire qu'il y'avait d'honnêtes gens sur Terre, j'ai arrêté de sourire pour rien, et je me suis dit que je devais faire comme lui, au moment où j'en aurais envie, et dire aux gens d'aller se faire mettre, une bonne fois pour toutes."

Il est écrit ça sur la quatrième de couverture. Blanc sur noir. C'est pour ça que j'ai choisi ce livre. Et pour le titre aussi. Et la couleur rouge du bouquin.
C'est grinçant, c'est gribouillé au stylo bille cette merde. Ça pourrait commencer bien, mais les couleurs sont déjà fades et effacées. Comme un dessin au crayon de couleur noir qu'on tenterait d'effacer à la gomme ; ça s'en va jamais.
C'est l'effet que m'a fait ce livre. Il ne délivre pas de messages positifs, pas d'espoir grandiloquent, c'est pas romantique et joli. Toutes les choses jolies, toutes les choses belles, toutes les choses que nous faisons en sorte qu'elles soient pour une existence merveilleuse, si ce n'est tranquille, mais souriante. Et bah, tout ça, quoiqu'il en soit, ça s'en va.
Et l'inconfort naturel, la haine, la crasse, tout ce qu'on recouvre de jolis couleurs, ça s'en va jamais.

En somme, un bon livre. Pas un joli moment, j'avais le ventre noué. Mais un très bon livre, qui se lit rapidement. Des personnages forts, et une histoire décousue, et rapiécée grossièrement, comme un patchwork mal fait qui est pourtant bien solide.
À lire.

(Et en bonus, une superbe playist 50s-60s-70s à la fin, pour accompagner la lecture.)


Méfiez-vous des enfants sages - Cécile Coulon
Ed. Viviane Hamy
16euros.

08/09/2010

14. J.H. Fragonard


Jean Honoré Fragonard (1732 - 1806)
Une petite visite au Louvre en ce temps pluvieux, et quel plaisir d'être au chaud, et de (re)découvrir avec délice des oeuvres comme ça. Non, je ne vais pas au Louvre voir la Joconde et la Vénus de Milo (si c'est le cas, on revient les yeux embrumés des flashs japonais), moi je viens me perdre dans un bâtiment royal.
Et ce fut mon coup de coeur du jour. Une douceur coquine, comme un chamallow acidulé, épicé. Une chaleur pastelle. Du XVIIème impressionniste presque.
J'aime Fragonard.

(Je ne ferais pas de biographie, parce que Wikipédia le fait mieux que moi. Et je ne suis pas étudiante en histoire de l'art, alors de la même façon que je ne permettrais jamais de critiquer Flaubert ou Kundera (même si c'est pour en faire l'éloge), je n'ai rien d'autre à vous dire que j'aime, et à vous le faire partager. Un peu.)



Renaud dans la forêt enchantée face au fantôme d'Armide

Les Curieuses
Le feu aux poudres

(si on clique sur les images, ça apparait en plus grand. déjà que la qualité internet est nulle, mais sur blogpost, ça devient presque moche)

06/09/2010

13. Les Déferlantes - Claudie Gallay



Sur le livre, il y a une jolie photo de vague, d'écume, et on sentirait presque l'odeur d'iode. En plus, avec ce titre, j'ai juste envie de faire du stop jusqu'à la côte océanique la plus proche, pour m'empiffrer de crêpes au beurre salé, le menton perdu dans une grosse écharpe en laine multicolore, et les pieds dans le sable, et un soleil couchant sur la mer. Ouais, tout ça.
Et puis, sur la couverture, il y aussi le tampon du Grand Prix littéraire des lectrices de Elle, dans la catégorie Roman 2009.
Alors, je l'ai piqué sur la table de chevet de ma mère, et alors que je prenais un train vers le soleil, à Gare de Lyon, la couverture du livre était sur de grands affiches, et ça m'a fait sourire, parce que j'avais le livre dans mon sac.

Alors, quand le train numéro jenesaisplus, à destination de Marseille qui s'arrêtera à Valence démarrait, j'ai ouvert le livre.
Dehors, il faisait déjà chaud et sec (doux été, qui disparait peu à peu d'ailleurs), et dans le livre il faisait froid et humide. Ça commençait bien. (C'est comme lire Les petits chevaux de Trintignan de Duras en attendant son train supprimé à Saint-Denis, un 12 janvier, à 7h40.)

Et puis, en fait non. L'histoire s'écoulait, s'étirait, comme un chewing gum qu'on étire à l'infini. Un chewing gum sale en plus. L'histoire se trainait en longueur. J'avais froid à cause de la clim' dans le train, et plus parce que j'étais au bout de la pointe du Contentin, à la Hague, en plein automne. Et je ne sentais pas l'odeur d'iode, mais du sandwich thon-crudités du gosse à côté de moi.

C'est l'histoire d'une narratrice qui n'a pas de prénom, qui à mal de "lui", et qui s'échappe loin de son Sud pour "travailler". Mais ça, c'est qu'elle dit, en vrai, elle souffre cette anonyme. Mais elle fait ça bien, attention, sans plainte, et juste quelque larmes dans le coin de sa chambre balayée par les courants d'air.
Et un jour, Lambert débarque au pays, cet orphelin, qui doit revendre sa maison d'enfance.
Et cette inconnue du Sud, elle fait comme si elle était née ici, elle raconte l'histoire de la Hague, de la vieille Nan, de Théo et ses chats. Et puis, forcément, même si ce n'est pas aussi cru qu'on le voudrait (non, ils ne couchent pas tout de suite ensemble), il y a du flirt dans l'air.
Et en plus, ça se finit bien cette histoire de souffrance, de grisaille, de sable dans les chaussures, et tous ces morts, tous ces non-dits qui sont salis de poussière et de gras, bah, tout ce petit monde finit au soleil, en souriant. Magnifique.

Dit comme ça, ça a l'air plutôt pas mal, hein ? En plus, je ne dis pas tout, je ne vais pas briser le suspens (haletant ! Ou pas.) mais il y a une longue histoire, comme un fil rouge d'un grand frère qui veut savoir si oui ou non le phare était allumé ce soir là, si oui ou non, c'est Théo qui a tué sa famille.
Une vraie enquête policière en somme, avec le chants des mouettes par dessus.
Sauf qu'au lieu de ça, l'histoire qui commençait bien s'enlise dans le sable mouillé, se laisse bouffer par les crabes, et quand elle se retrouve dans les courants marins, elle n'essaye même pas de se débattre pour remonter à la surface. En gros, cette histoire est morte d'avance, et je me suis ennuyée de la vingtième page à la dernière.
Au début, on croit que ce n'est qu'un effet stylistique, et ça plait, cette langueur, cette attente. Et j'ai aimé ça. Et puis, après, pendant tout le reste de mon voyage en train, et le reste de mon séjour en Ardèche, j'ai attendu le frisson, le moment où tout se déclencherait enfin ! Et puis rien. Ou peut-être deux lignes sur 500 pages.

Alors c'est peut-être le livre de l'été, et peut-être que je n'aime rien aussi. (On me le dit souvent.) Mais n'empêche, que c'était bien décevant, et que je me suis bien ennuyée. Dommage.

(Les Déferlantes (2008) - Claudie Gallay. Éditions Flammarion, collection J'ai lu)

06/08/2010

12. James Ensor


holidays. Belgium. so museum.

James Ensor (1860-1949)

« Ne remuons plus ce grand cadavre flamand. Aujourd'hui mannequin creux, décoloré, animé par quelques criquets agressifs. Flandrophyliseurs intempestifs, désorienteurs déclassés délirants, vos excitations intéressées de siffleurs décalqués restent sans écho. L'art moderne n'a plus de frontières. À bas les rembrunis acariâtres. Fromagers égoïstes et sirupeux. Alarmistes frontiérisés. Charcutiers de Jérusalem. Moutons de Panurge. Architectes frigides et mélassiers, etc. Vive l'art libre, libre, libre ! »
Ensor aux masques - 1889

L'intrigue - 1890

L'entrée du Christ à Bruxelles - 1898

L'entrée du Christ à Bruxelles - 1898


Clowns rouges et blancs évoluant - 1890

La mort et les masques - 1897

Le banquet des affamés - 1918

Le foudroiement des anges rebelles - 1889

Masks confronting death - 1886

Nature morte avec vase de fleurs - ?

Squelettes dessinant des puérilités - ?

Vieille dame avec masques - 1889

Squelettes se disputant un hareng-saur - 1891

26/07/2010

11. "Toute la volonté du peintre doit être silence" (Cézanne)


Les cigales, les oliviers, le rosé, la lavande et la Sainte Victoire. C'est cliché, mais c'est vrai, et j'aime ça.
Entre les calanques de Cassis (à voir pour l'eau turquoise, et le plaisir de se baigner, seule), les montagnes, et 36° degrès à l'ombre, je comprends pourquoi la Provence a inspiré tant d'artistes, parmi lesquels compte évidemment Cézanne.


Ainsi, le musée Granet à Aix-en-Provence, propose une rétrospéctive sur le traval d'Alechinsky jusqu'au 3 octobre.
Quelque chose comme 170 oeuvres sont exposées de nature variées ; peinture, céramiques, dessins, livres.


Cet artiste belge, né en 1927, s'inscrit dans le mouvement surréalisme et expressionisme en se liant d'amitié avec de nombreux artistes tels que Giacometti, Dubuffet ou Micheaux. Et même plus encore, il crée un collectif CoBrA avec d'autres arstistes originaires du Nord de l'Europe, et ils s'inscrivent dans un mouvement qui pousse à la plus totale spontanéité, et le refus de la spécialisation.

Le musée Granet montre alors toute l'étendue de l'oeuvre de l'artiste. De ses oeuvres gigantesques, représentatives de son travail, à ses céramiques, drôles et touchantes à la fois.
On découvre de la même façon sa collaboration avec différents auteurs, et son travail d'illustration, relativement important. (On retient particulièrement, pour l'anecdote, ce livre de deux centimètres carré.) Et puis, de nombreuses encres sur de vieux papiers, certains datant même du XVIII siècle.


La mer noire (1988 - 1990) _ ?

En somme, une petite exposition qui met bien en valeur le travail de l'artiste, et une jolie balade où l'on oublie qu'on est à Aix, et où l'on se croit sur un bateau noir, à regarder un ciel coloré.



Et puis, on peut également voir à 15 kilomètres du centre d'Aix, le château de Vauvenargues, dans lequel Picasso vécut, entreposa ses oeuvres, et est enterré avec sa femme.
Le château est situé juste en face de la Sainte Victoire, et Picasso s'exclama d'ailleurs "J'ai acheté la Sainte Victoire !" en parlant de cette demeure. En effet, la propriété qui appartient aujourd'hui à sa petite fille (si je ne dis pas de bêtises) comprend également un pan de la montagne, jusqu'au mont adoré de Cézanne.
Le château ne présente pas d'interêt tout particulier, ni dans son architecture très simpliste, ni par son intérieur, dont il ne reste à peine quelques meubles appartenant à Picasso.
Le plaisir est juste celui de savoir que Picasso a foulé ce sol avant nous, et puis la balade, qui vaut vraiment le coup.

La Montagne Sainte Victoire - Cézanne (?)


En bref, la Provence, c'est bien, c'est beau, il y a des tonnes de choses à voir, entre la montagne et la mer, et je suppose qu'on doit s'y faire aux chants des cigales ?

19/07/2010

10. "La photographie, c'est le regard. On l'a ou on ne l'a pas"


"Mes photos ne sont pas des revanches contre la mort et je ne me connais pas d'angoisse existencielle. Je ne sais même pas où je vais, sauf au-devant - plus ou moins fortuitement - de choses ou de gens que j'aime, qui m'intéressent ou me dérangent."
Willy Ronis


La Monnaie de Paris, en association avec le Jeu de Paume, ouvre une magnifique exposition qui présente de nombreuses photos connues ou inédites du grand photographe français Willy Ronis.
En effet, à l'occasion de son centième anniversaire, un an après sa mort, un hommage est rendu à ce photographe qualifié comme humaniste, parce qu'il a su mêler, comme Doisneau ou Boubat, les valeurs humanistes de son époque d'après-guerre, et une certaine esthétique poétique. Ainsi, on parlera de Willy Ronis et de ses oeuvres comme une poétique de l'engagement.

L'exposition, dans ce magnifique lieu, aux parquets qui craquent et plafonds aussi haut que le ciel, se divise alors en plusieurs thématiques ; la rue, le travail, les voyages, le corps et sa propre autobiographie.

On peut donc observer le travail impressionnant de Willy Ronis. Redécouvrir ses photos les plus connues, qu'on a vu et revu dans des livres, sur le net, comme Les Amoureux de Bastille (1957), Pluie place Vendôme (1947) ou autres chefs d'oeuvre de la photographie.
Et puis on découvre des petits trésors, des instants de vie volés à travers une photo en noir et blanc.

Café de France - 1979

Ainsi, quand on quitte l'ambiance feutrée, intimiste de musée de la Monnaie, on sourit doucement d'avoir redécouvert ce grand homme de la photographie, et on remercie on-ne-sait-qui d'avoir inventé un jour ce procédé magique qui m'a permis pendant une demie heure de remonter le temps.
À voir, absolument.

Autoportrait aux flashs - 1951

10/07/2010

9. Search and Destroy

Mercredi 7 juillet 2010


Les lettres rouges brillent au-dessus de l'Olympia, même si le soleil est haut dans le ciel. Les places se vendent aux prix d'or au marché noir, et le public rentre petit à petit.
Ce soir, c'est Iggy and The Stooges qui se produit sur scène.

À 63 ans, l'Iguane et son groupe décident de refaire une tournée mondiale; c'est un souffle de jeunesse qui enlève la poussière de leur troisième album, Raw Power, édité en 1973. En effet, malgré la mort récente du guitariste Ron Asheton, le désormais célèbre Iggy Pop revient sur scène avec son groupe et réinterprète magnifiquement ses plus grands tubes tels que Search And Destroy ou encore I Wanna Be Your Dog.


C'est donc un public très hétéroclite qui s'amasse devant l'Olympia. En effet, entre les kids de 10ans, accompagnés de leurs parents aux cheveux grisonnants, aux petites nanas de 18ans aux jeunes cadres de la trentaine, c'est le public le plus large qu'on pouvait réunir.

Et c'est dans une ambiance bon enfant que la première partie démarre. Jessie Evans, une jeune Berlinoise à l'allure déjanté, qui se trémousse sur scène un saxophone dans les mains, accompagnée seulement d'un percussionniste. Une performance longue, avec beaucoup d'énergie, et d'une avant-garde stupéfiante, mais qui ne suffira pas à détendre le public, qui n'est là que pour Iggy.
Et puis, ils arrivent enfin ; The Stooges, groupe mythique des 70's débarquent sur la scène de l'Olympia. Malgré le son exécrable, Iggy Pop se jette sur scène tout de suite, en pantalon de cuir, et torse nu. Malgré les années, malgré la drogue, il se tortille et se déhanche comme s'il avait 20ans, et qu'il était toujours cette icône "glam-punk", à la manière de David Bowie.
Le public se déchaine et chante en chœur les paroles des tubes planétaires. Iggy Pop se jette plusieurs fois dans la fosse, jette ses micros n'importe où, et les musiciens n'ont rien perdu de leur talents. Grandpas rocks !
Le concert se termine rapidement au bout d'une petite heure, sur Iggy Pop, les fesses à l'air (et le sexe en l'air !) qui nous salue chaleureusement et nous remercie vivement. Les autres membres se contentent de nous saluer respectueusement, nous remerciant intimement d'être toujours là 40 ans après.

C'est nous qui les remercions, pour ce dernier concert parisien (qui sait ?) , où le public a cru avoir 20 ans au début des années 70. Iggy and The Stooges, plus que d'être des dieux, des précurseurs dans la musique, c'est un moyen de retourner dans un passé où la musique voulait dire quelque chose, où les choses étaient plus simples, plus spontanées et où l'on croyait encore à un futur meilleur. Et c'est ça qu'est bon.


27/06/2010

8. Crime et châtiments


"Mais qu'est-ce donc que l'exécution capitale, sinon le plus prémédité des meurtres auquel aucun forfait criminel, si calculé soit-il, ne peut être comparé." Albert Camus


Théodore Géricault - Étude de pieds et de mains


Jusqu'à aujourd'hui, l'exposition Crime et châtiments était présentée au Musée d'Orsay. Véritable rétrospective de l'histoire du meutre, du drame, du sang, de l'horreur, de 1791 à 1981 (date de l'abolition de la peine de la mort), le public est averti en entrant dans le musée.
Les murs sont peints en noirs, rouges, verts ; "Tu ne tueras point" nous accueille à l'entrée ; et la guillotinne, véritable, veille sur l'ensemble. Les visiteurs chuchotent, et moi-même, je suis un peu mal à l'aise.

De nombreuses oeuvres, grandioses sont exposées dans cette exposition, comme Lady Macbeth, somnambule de Füssli ou encore La Vague de Schwabe, et de nombreux croquis, esquisses, aquarelles sont présentées, notamment de Goya ou de Victor Hugo.
Hugo, qui nous accompagne d'ailleurs pendant toute l'exposition, parmi ses dessins, ou ses textes.

En fait cette exposition fonctionne comme un livre, qui nous explique notre vision du mal en l'espace de deux cent ans.
Si on commence du pêche originel, le mal radical selon Kant, de la crucifixion de Jésus, on en vient vite au meurtre de Marat, interpreté dans une dizaines d'oeuvres fondatementalement différentes, puis la figure de la femme, de la justice, et enfin une longue étude phrénologique pour terminer sur le surréalisme.
Un long livre qui nous montre que "ce qui intéresse les artistes, c'est la violation des interdits fondamentaux, le sacrilège." (Robert Badinter)

Ainsi, on peut dire que c'est (ou c'était !) une exposition interessante, avec de belles oeuvres exposées. Mais peut-être trop portée sur l'étude du crime que le crime en lui-même ; c'est plus une essai philosophique imagé qu'une exposition artistique.


Victor Hugo - Justicia

Tout ça pour dire qu'en sortant, on se pose juste des questions sur la moralité de l'homme, et surtout, si nous autres innocents, n'étions pas tous malsains à admirer la représentation du mal absolu ?

22/06/2010

7. 99F - Frédéric Beigbeder



En 2000, parait aux éditions Grasset, 99F, quatrième livre de Frédéric Beigbeder. Après un raz-de-marée médiatique, ce livre permet à Beigbeder d'être licencié de son agence de pub.
Oui, ce roman est en quelque sorte autobiographique. Octave, directeur artistique (AD) crée des pubs, ou plutôt crée des désirs, pour nous autres, pauvres consommateurs abrutis devant notre télé. Octave est dieu, et nous sommes ses sujets ; nous achetons parce qu'il l'a décidé.

En gros, ce livre est une énorme critique du monde de la pub, qui n'est que sex, drugs and fall. Brutal fall décidée par Octave qui veut être viré. C'est l'histoire de la déperdition consciente de ce roi du monde, qui n'est rien sans divertissement.

Oui, c'est dit comme ça dans le livre. Avec les références à Pascal, Nietzsche, Marx et autres. Références, que moi, élève de fin de terminale L, j'ai.
Rien de grandiloquent quoi.

À part le style qui est quand même plus travaillé, je n'avais rien lu d'aussi plat depuis Marc Levy et Guillaume Musso.
L'histoire se fait, sans grandes péripéties ou évènements marquants. Rien ne semble extraordinaire, et c'est bien ça le problème. La drogue, les putes, la mort, tout ce qu'il y a de plus cru et de plus violent dans ce monde est décrit comme si on se parlait du temps qu'il fait. C'est normal.
Et cet espèce de glamour du trash, comme une pub où un mannequin anorexique présenterait un produit amincissant, se finit sur une apothéose irréaliste, à la limite de la science fiction. Quoique, le côté initiatique, avec le méchant pas beau qui finit puni par la société, c'est drôle aussi.
Le pire, ce doit être ce ton absolument snobinard, du moi-je-sais-tout, et je-vous-envoit-la-vérité-en-pleine-face qui se veut pour détester le narrateur, mais qui ne me fait que détester l'ensemble de l'œuvre.

Bref, ça se veut littéraire, ça se veut presque philosophique, et pourtant, ce livre qui fout des paillettes sur une critique faussement acerbe de la publicité n'apprend rien qu'on ne sait déjà sur notre humanité détestable, et n'est en aucun cas un chef-d'œuvre de littérature.

Octave s'ennuit de ce monde qui tourne trop vite. Moi je me suis ennuyée à lire 99F.

12/06/2010

6. Music is everything.

Closer to The Edge - 30 Seconds To Mars



Le dernier clip de ce groupe (génialissime !) est sorti il y a quelques jours.

Objectivement, pour les personnes qui n'aiment pas ce groupe, ou qui ne l'aiment pas tout particulièrement trouveront ce clip sans intérêt. Certes, il reste très bien filmé, les petits commentaires comme "This is what we call dancing." sont hilarants, et peut-être qu'il donne envie de voir les trois américains sur scène.

Je ne sais pas, je fais partie de ces personnes qui idolâtrent ce groupe, qui sourit rien qu'en parlant d'eux, qui écoutent leur chansons en boucle. (Et en plus, je ne suis qu'une sale groupie de Jared Leto, mais ça c'est une autre histoire.)
Quoiqu'il soit, je trouve juste ce clip sublime. Les prises de vues sont géniales, les photos des membres bébés sont cools, les interviews sont tellement représentatifs de l'ambiance, de l'univers 30STM. "Some people believe in God, I believe in music"
Et en plus, quand je vois ce clip, je ne peux que me rappeler les deux heures de concert magnifiques, à Paris Bercy, le 05 mars dernier. Parce que c'est le seul groupe que je n'ai jamais vu, qui donne absolument tout sur scène. Ils sont là, tous les trois, et c'est une grande fête à chaque fois. Une grande fête de famille j'imagine.

Alors moi, j'ai été émue aux larmes en visionnant ce clip.

One band. And 1,963,830 of us.



Vidéo en meilleure qualité

(hum. personne ne lit ce blog, mais n'empêche, j'suis en pleine révision du BAC, alors pour plus d'articles interessants, on repassera...)

24/05/2010

5. Your Betrayal - Bullet For My Valentine


Honte à moi ! Je viens seulement d'écouter le dernier album de Bullet For My Valentine aujourd'hui !
Je ne sais pourquoi, j'avais juste complètement oublié que Fever était sorti (il y a un deux, trois mois ?)
Alors en ce jour férié où il fait beaucoup (beaucoup, beaucoup) trop chaud, j'ai cliqué sur Deezer.


On a beaucoup parlé de Bullet For My Valentine en 2006, avec The Poison. Ils faisaient toutes les couvertures de (rares) magasines de rock, et c'était un peu comme un phénomène dans le milieu metalcore/hard rock/heavy métal. J'avoue que j'ai la flemme de ressortir de la poussière mes vieux exemplaires de Rock One.
Bref, le premier album était salué par la critique, par les autres groupes (c'est qu'ils ont quand même assuré la première partie de Iron Maiden ou Metallica !) et en fait, le deuxième album aussi. En fait, comme le veut la tradition, le deuxième opus était très attendu, et ils ont fait leur preuves les petits Gallois.
Alors après d'immenses tournées en Europe et aux USA, le dernier album est sorti début 2010.


Déjà, la jaquette n'annonce rien de nouveau par rapport aux précédents albums ; le même graphisme gothico/dark, toujours une nana bizarroide.
J'écoute Your Betrayal; rien de nouveau, et c'est ça qui est bon ! Et le reste de l'album est pareil. Un son bien comme il faut, heavy metal/hard rock. Des guitares saturées, Matt Tuck qui crit toujours autant. Peut-être un peu plus d'influence pop pour certains refrains, et des sons clairements eighties pour quelques solos.

Mais en somme, du lourd. Un bon travail de fond, des compositions toujours entrainantes (oui, moi, j'ai envie de pogoter toute seule dans ma chambre !) et une énergie à revendre.

Après oui, ça reste une nouvelle soupe faite dans la même marmite, ok. De nouveaux ingrédients, mais toujours le même arrière-gout. Alors ceux qui n'ont pas aimé les deux premiers albums n'aimeront sûrement pas celui là !
C'est peut-être le seul point décevant de ce nouvel album, qui sonne comme un medley des précédents.

Qu'importe, je suis sûre que pour les chanceux de Clermond Ferrand, Bordeaux et Strasbourg, (et non pas Paris !), les concerts seront géniaux.
Parce que mine de rien, les Gallois sur scène, ils gèrent.



On Deezer ;
Fever
Scream, Aim And Fire
The Poison



PS ; WEHEARTIT, à droite. Parce que ça fait partie des choses qui m'attirent, que j'aime, qui font pétiller mes yeux. Parce que c'est inutile, et que i love useless stuffs !

12/05/2010

4. "Non, l'homme ne descend pas singe mais plutôt du mouton" (J'accuse)




Mercredi 05 mai 2010.


Le Zénith de Paris est plein à craquer de jeunes babs, de trentenaires qui hurlent "Je t'aime" alors que les lumières ne sont même pas encore éteintes, et des jeunes habillées de vintage cheap (ou pas).Ce soir-là, l'une des meilleures salles de Paris était complète pour Damien Saez.

Damien Saez, pas du tout joyeux fanfaron, abreuve nos oreilles de "pleurnicheries" comme il se plait à le dire, depuis déjà 10 ans. On retiendra "Jeune et Con" qui passe en boucle sur Virgin Radio depuis trop de temps, sa prestation aux dernières Victoires de la musique qui a laissé Nagui sans voix, l'affiche de ses concerts censurée dans le métro et.. c'est tout.
En effet, depuis 10 ans, on entend peu parler de Saez, d'abord parce qu'il l'a choisi, et ensuite parce que à qui ça plairait d'entendre "Faut du gazoil dans la bagnole, la carte bleue dans la chatte" (J'accuse) ou encore "Les seins de Marilyn ou les saints de Marie, tu sais moi je m'en fous, tant qu'elle est à genoux" (Marie ou Marilyn) dès qu'on allumerait notre radio.Entre provocation, poésie, tragédie et (surtout !) contestation, Damien Saez réunit de nombreux fans, tout étant complètement inconnu du grand public.

En tout cas, ce soir-là, le Zénith était sold out (oui je me répète, mais un artiste pas médiatisé qui fait une tournée en France et remplit le Zénith, c'est pas donné...), et c'était de la poésie et de la rébellion qui flottait dans l'air !


À 19h45, les lumières se sont éteintes pour nous laisser apparaitre un mix entre un Cabrel nullissime, et un fake de Saez. Guillaume Favray. Sans aucun intérêt.

Et puis après une heure de sound check, Damien Saez apparait enfin sur scène pour nous chanter "Les Anachirtectures", en bafouillant quelque peu.Et puis les chansons s'enchainent ; on a droit à presque tout son dernier album (J'accuse) qui déménage. Une énergie très rock, presque punk, et il y a du pogo violent dans la fosse ! (Et oui, les mecs de la trentaine qui boivent trop de bières sont en fait des groupies hystériques de Saez.)

Enfin, Saez reste seul sur scène, et nous offre un long, très long set acoustique. Il nous offre "Je veux qu'on baise sur ma tombe", "Jeunesse lève-toi", "Saint Petersbourg", "Autour de Moi Les Fous", "Tu y Crois Toi". Que du bonheur.

Il sort de scène plusieurs fois, pendant quelques minutes, ce qui laisse croire au public que le concert est bel et bien fini, avant de revenir, une cigarette dans la bouche pour nous jouer encore quelques chansons.
Quand il revient pour la dernière fois, il passe la main dans ses cheveux, écrase sa clope sur scène et nous dit "Je vous jouerais bien encore une dernière pleurnicherie, mais je sais pas laquelle... Je sais, c'est pas très professionnel, le concert aurait du être fini depuis une heure... Mais c'est ça qui est beau."
Et il nous joue "Le Cavalier Sans Tête" et "Tricycle Jaune" avant de partir définitivement de la scène.


Un concert absolument magnifique. Damien Saez n'était pas ce gars qui dit ne pas aimer la scène, tout au contraire. Ses sourires, ses remerciements, et ses quelques mots lancés à la foule donnaient l'impression d'être à une soirée entre amis. Une guitare acoustique, et la foule chantait à sa place. En somme, une véritable harmonie entre Saez et le public.
Bref, un long concert de trois heures entre ses classiques et son nouvel album; un concert absolument parfait.


À écouter ;
Regarder les filles pleurer (J'accuse)
Fils de France
Putain, Vous m'aurez plus (Varsovie)
Que tout est noir (Varsovie)
J'veux du nucléaire (God Blesse)
S'en aller (Paris)
Police
Ma petite couturière
Pilule (J'accuse)
Jeunesse lève-toi (Varsovie)
Jours étranges (Jours étranges)
Crépuscule (Jours étranges)

(enfin tout quoi !)

EDIT ; Le concert du 5 mai (et d'autres aussi...) ont été enregistrés, et le son est juste incroyable ! HERE

08/05/2010

3."L'homme fût crée mâle et femelle, ce dit l'Écriture." (Marie Le Jars de Gournays)


"Les femmes ont le droit de monter à l'échafaud. Elles doivent également avoir celui de monter à la tribune" Olympe de Gouges




Alors que se déroule en ce moment-même les États Généraux de la Femme, organisée par le magazine ELLE, je lis une anthologie d'écrits féministes. Un recueil en attente sur ma table de nuit.

Comme beaucoup de jeunes filles, de femmes, je pensais d'une certaine manière que le combat de la femme était terminé, que désormais être une femme, ça ne voulait rien dire, que c'était quelque chose de normal, que nous vivions dans une époque où nous étions déjà toutes "devenues" femme; nous avons le droit d'aller à l'école, de voter, de travailler, de souscrire un prêt à la banque sans l'aide de personnes.
C'est vrai, les choses ont beaucoup bougé depuis les années 50s où la femme était ce pauvre être qui hantait entre le supermarché du coin, sa cuisine, et l'école de ses gosses. Et aujourd'hui, la femme, légalement, a gagné tellement de batailles !
Mais quelle pression sociale, bon dieu, quelle pression !

La parité n'est pas encore bien respectée (regardez la gueule de notre gouvernement !), et une femme est toujours et encore considéré comme un être bon pour faire la cuisine, le ménage, et porter des gosses dans leur gros ventre.
Alors, c'est encore ça la représentation de la femme au XIX siècle ; une pute comme Madeleine, une tentatrice idiote comme Ève, ou une vierge sacrée comme Marie ?
Moi qui pensait que les choses avaient changés.



Alors j'ai ouvert cette anthologie ; Écrits féministes de Christine de Pizan à Simone de Beauvoir, présentée par Nicole Pellegrin (ed. Flammarion)
Bien sûr que j'aimerais que toutes les femmes de ce pays, de ce monde -!- ait lu Le Deuxième Sexe de Simone de Beauvoir (véritable oeuvre de littérature et de contestation), mais en attendant, une simple anthologie, vraiment très bien foutue.
Des textes choisis de grandes et grands (si si !) écrivains qui défendent la cause des femmes, et nous explique ce que la société du XVI au XX siècle.

Il ne sert à rien de vous dépeindre chaque auteur, de décortiquer chaque texte, et de vous présenter leur thèses. Je pense qu'il faudrait que chaque fille, chaque femme y jete un coup d'oeil. Les idées sont des écrits avant d'être des manifestations dans les rues.
Et aucune femme ne devrait être dépréciée, battue, méprisée parce qu'elle possède un utérus. On ne devrait même pas se battre, aujourd'hui, pour les droits de la Femme...
Mais il nous reste des combats à mener ! Alors, femmes, levez vous !


(Je vous laisse sur cette citation. À laquelle n'a-t-on jamais dit qu'elle était une salope parce qu'elle portait une jupe au dessus du genou ?)
"En effet, supposons qu'on put inventer un moyen de réduire toutes les femmes, sans exception, à cette chasteté qu'on exige d'elles, de manière que nulle femme ne pût se livrer à l'amour avant le mariage, ni posséder après le mariage d'autre homme que son mari ; il en résulterait de là que chaque homme ne pourrait avoir dans tout le cours de sa vie que la ménagère qu'il aurait épousée. Or quelle serait l'opinion des hommes sur cette perspective d'être réduits, pour toute leur vie, à ne jouir que d'une épouse qui pourra leur déplaire dès le lendemain du mariage ?"
Charles Fourier, Traités des quatre mouvements et des destinées générales, 1808

26/04/2010

1. Für Immer Jetzt

Il y a presque deux semaines, j'ai fait quelque chose que je ne referais au grand jamais.

Je suppose que chacun pouvant lire ces mots sont au courant de l'existence d'un certain groupe de pop-rock allemand, qui s'appelle Tokio Hotel.
Je ne vais pas raconter ma vie, it's useless. Mais vous devez savoir que depuis qu'ils ont subitement explosé tous les charts en France, et même avant, je suis devenue fan de ce groupe.
Évidemment, j'étais une jeune fille, toute innocente à l'époque. Et la notion de musique ne dépassait pas ce que je pouvais entendre au Hit Machine, fabuleuse émission made in M6. Et, évidemment, je n'avais aucun fucking recul sur ce groupe.

N'empêche, qu'en tant que jeune fille innocente, je les ai suivi, et j'ai évolué avec eux. Je ne fais pas partie de ces filles qui claquent leur argent de poche, leur étude, leurs parents pour ces quatre garçons à tendance rock. Même en tant que jeune fille innocente, j'ai été assez raisonnable pour ne pas faire n'importe quoi. Grand bien m'en fasse.

Les magasines en ont parlé comme de la "tornade allemande". Une tornade qui passe, qui ne fait que passer. Je n'ai jamais voulu croire que c'était un véritable phénomène de mode, mais en fait... si. Même la jeune fille innocente que j'étais s'est lassée.

Alors quand ils sont passés donné un concert à Paris Bercy, le 14 avril 2010, le dernier de leur "Humanoid City Tour", je me suis "Why not ?" Après tout, je n'avais rien à perdre à aller voir ces jeunes hommes qui m'avaient fait rêvé.

Je ne m'attendais pas à voir un concert magnifique, un show extraordinaire comme j'ai pu voir avant. Mais j'y suis allé, pour le souvenir.


Leur dernier album, "Humanoid" était sorti au mois d'octobre, après un an de travail entre l'Allemagne et les États-Unis. Un double album d'ailleurs; un en anglais, un en allemand. Pour rassembler le plus de personne, pour faire le plus de bénéfices.
J'avoue que à la première écoute sur Deezer, j'ai grimacé. Les deux premiers albums nous livraient une espèce de pop à tendance rock juvénile, et mine de rien, ça passait aux oreilles. Ce n'était pas du grand art, mais il y avait une espèce de fraicheur candide dans les paroles et la mélodie. Et je ne m'étonne toujours pas de l'engouement qu'ils ont pu créer.
Et ce dernier album, beaucoup plus travaillé ne sonnait pas pareil. Peut-être que je voulais m'accrocher à mes souvenirs, mais ce son quelque peu electro, comme tout ce qui se fait maintenant, me rebutait un peu.
On entend des influences à la Lady Gaga sur "Sonnensystem" ("Dark Side Of The Sun"), "Hunde" ("Dogs Unleashed") semble être remixé par David Guetruc, et je ne trouvais plus la tendance rock qu'ils avaient eu.
En somme, j'étais déçue, et pas vraiment enthousiaste, mais bon, pourquoi pas ?

J'ai alors attendu le concert, comme une partie de rigolade entre copines -encore et toujours- hystériques, et j'ai écouté l'album, un peu plus.
Je ne peux que reconnaître que malgré ces tendances electro, un peu moins rock, cet album est foutrement travaillé. Les quatre gars de Tokio Hotel avait mis tout en pause pour composer, produire, enregistrer, et le résultat était là ; c'était un bel effort. Il y a une recherche, un but, un fil directeur sur cet album. Et l'univers autour est également construit.
La jaquette de l'album annonçait tout, comme les photos du livret, et les paroles "Hey du, kleine Android" ("hey toi, petit androide"), "du bist wie'ne Maschine" ("tu es comme une machine") et autres...
C'est ça le changement radical du groupe; il y a un thème, un univers, et pour le coup, la forme colle parfaitement au fond.

Je me suis alors rendue au concert en me disant que même si je n'étais pas complètement dingue de cet album, je pouvais au moins voir ce que ça donnait en live.
Et pour pimenter le tout, j'ai fait ce que toute fan de Tokio Hotel fait ; j'ai ramené un sac de couchage, de la bouffe pour quatre, un bon bouquin, et j'ai dormi devant Bercy. Je vous épargne les détails douloureux d'une nuit humide, gelée, sous une tente Quechua (sponsor offciel de cette tournée) gentiment prêtée, l'attente dans la poussière, entourée de filles hystériques, méchantes et égoïste.

On a eu droit à un DJ de la célèbre et géniale radio NRJ pour chauffer la salle (et ça a marché en plus ! Il a massacré Smells Like Teen Spirits de Nirvana, et les filles braillaient comme des truies dans la fosse!)
Puis, un groupe français made in Universal, Vadel. Pour une fois que la première partie n'était pas complètement naze, personne n'a rien écouté. Pourtant, j'ai aimé leur énergie sur scène, leur coupes de cheveux et leur son inspirés des 60s et 70s, et leur courage de faire face à une salle -pas complètement remplie- qui ne les attendait pas. (et je suis d'ailleurs déçue, puisque leur son est mille fois meilleur en live sur leur album)


Et puis, Tokio Hotel, si attendu, est arrivé sur scène. Et parmi les filles qui pleurent, qui crient, qui se battent, qui crient, qui s'évanouissent, qui crient, qui prennent quatre photos à la seconde, qui crient, j'ai été bluffé.
La première fois que j'ai vu Tokio Hotel sur scène, c'était fin 2006, au Bataclan. Petite scène, petit moyen. Comme sur leur gigantesque tournée en Allemagne, sur scène, il n y avait rien. Juste des lumières, et trois plots sur lesquels les quatre garçons étaient ridiculement élevés.
Aujourd'hui, il y a une boule façon vaisseau spatial qui s'ouvre pour les laisser jouer sur scène, le chanteur Bill Kaulitz porte des costumes absolument délirants, inspirés directement de leurs univers alien/machine/robots, dessinés par les stylistes de la marque DSquared, il y a de la fumée, des flammes (façon Rammstein), une moto qui apparait pour juste une chanson.
En somme, "Humanoid City Tour 2010" est un vrai spectacle, avec une mise en scène travaillée, recherchée, réglée à la minute prêt peut-être -les mêmes mots, les mêmes jetés de bouteille, sur toutes les dates-, mais un show, un vrai.
Les quatre garçons, sur cette dernière date, après deux mois de concerts ont assurés comme ils l'ont rarement fait. Une véritable énergie, une envie, un plaisir d'être là, tous les quatre ensemble.
Un à un, on ne retiendra que Bill, le chanteur, tellement impressionnant comme ça, maquillé et habillé à la perfection. Il tenait ses notes remarquablement, sans faussetés, et son charisme attirait les yeux de toutes les filles de la salle. Son frère Tom, le guitariste était un peu plus effacé, et son solo de guitare n'en était pas un, et me laisse déçue. Georg Listing, le bassiste était complètement absent, et le batteur, Gustav Schaffer, malgré son énergie débordante, était caché derrière sa batterie, et n'a fait hurlé la salle que pendant sa -désormais- célèbre hola à la fin du show.


Mais quand je suis sortie de la salle, je me suis dit que c'était un bon concert, vraiment.
Tokio Hotel s'est longtemps fait descendre par les médias, parce que le chanteur est indéniablement gay, parce que c'est un groupe "à midinettes" comme l'a pu être 2be3 ou autre daubes d'une sombre époque. Et le public a toujours été très ciblée; il faut faire crier les filles. Et les mecs, -les vrais !- pensent que ces quatre pédales ne sont bons qu'à faire mouiller leur copines. En gros, ils sont nuls.
Ce que le grand public ne sait pas, c'est que Tokio Hotel, c'est bien plus que ça au fond. Mis à part qu'ils ont été au tout début un groupe de garage, de quatre gars de la banlieue berlinoise qui voulaient gouter un peu à la gloire, sans grande envergure, ils sont les seuls à ma connaissance à avoir rempli des salles de plus de 10 000 personnes dans toute l'Europe à, à peine 18ans.
Alors bon, on peut dire ce qu'on veut sur ce groupe "qui ne vaut rien", mais c'est pas donné à tout le monde.

Et si cette tournée n'a pas été sold out, je peux juste me permettre de penser que leur pause d'un an, méritée, a fait partir une partie du public, celle du "phénomène", celles qui ont suivi la mode. "La tornade TH" est passée, s'en est allé, et leur dernier album n'a pas été compris.
Et vous savez quoi ? Il y a encore, et toujours -comme indestructible- un public. On parle moins de Tokio Hotel ces derniers temps, et c'est tant mieux.
J'appellerais ça, une phase de transition. Le public est en train de changer, de vieillir, de murir; comme eux. Et même si Bercy n'était pas entièrement complet ce dernier 14 avril, les filles qui étaient là, c'était les premières, celles du tout début. Moi.


Et pour la fin, je dirais juste que; non, Tokio Hotel n'est pas un groupe sans envergure musicale, qui n'est là que pour faire crier les filles.
Tokio Hotel est un groupe qui a osé, qui a travaillé, qui a tout donné. Et je crois pouvoir dire qu'ils ont encore de beaux jours devant eux...
(Et moi, jeune fille plus innocente, je serais là aussi, pour "ces lendemains chantants". Sauf que je ne dormirais plus jamais devant une salle de concert.)

"this is the story of my life"

Pas de présentation abusive.
Rien, non rien.


Juste des compte rendus, des avis. Un espèce de blog à tendance culturelle. À tendance, seulement. Pas de prétention.
J'ai juste quelque chose à dire, à raconter ; qu'importe si ça n'intéresse personne.